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Ce système de sept planètes pourrait être habitable

Dossier
Paru le 16.10.2017
2017, année de science
Point de vue

Ce système de sept planètes pourrait être habitable

22.02.2017, par
Vue d’artiste de l'étoile Trappist-1 depuis la surface de l’une des sept planètes gravitant autour d’elle. Plusieurs de ces planètes se situent à la distance requise de l’étoile pour envisager l’existence d’eau liquide à leur surface.
Une équipe internationale a mis au jour un système de sept planètes de la taille de la Terre, dont plusieurs semblent potentiellement habitables, autour de Trappist-1, une étoile naine ultrafroide proche de nous.

Jamais auparavant la découverte d’un nouveau système exoplanétaire n’avait suscité autant d’enthousiasme de la part des astronomes. C’est en effet pas moins de sept planètes toutes quasiment de la taille de la Terre, et probablement rocheuses comme elle, qui ont été détectées par une équipe internationale autour d’une étoile relativement proche de nous, à 40 années-lumière1. Mieux encore : plusieurs de ces exoplanètes réunissent les conditions pour que de l’eau liquide soit présente à leur surface. De quoi faire de ce système une des cibles les plus prometteuses à ce jour dans la recherche à distance de traces de vie hors du système solaire.

Trappist-1, une étoile naine ultrafroide

Les sept nouvelles planètes orbitent autour d’une étoile bien particulière : une naine ultrafroide. Beaucoup plus petits et bien moins chauds que le Soleil, ces astres sont habituellement délaissés dans la recherche d’exoplanètes car ils sont peu lumineux et donc peu visibles. Mais après cinq ans passés à scruter une soixantaine de ces petites étoiles, le télescope belge Trappist, installé au Chili, a déniché la perle rare : l’étoile baptisée Trappist-1, d’une taille équivalente à seulement 12 % de celle du Soleil, et n’émettant que 0,05 % de sa luminosité.

Les premières découvertes concernant le nouveau système planétaire ont été faites en 2015 à l’aide du télescope Trappist, installé à l’observatoire de La Silla (Chili), qui a donné son nom à l’étoile.
Les premières découvertes concernant le nouveau système planétaire ont été faites en 2015 à l’aide du télescope Trappist, installé à l’observatoire de La Silla (Chili), qui a donné son nom à l’étoile.

En observant la lumière infrarouge émise par la minuscule étoile, les chercheurs menés par Michaël Gillon, de l'université de Liège, en Belgique, ont détecté des baisses de luminosité caractéristiques du passage de corps célestes devant celle-ci – ou transits. Dès 2015, trois premières planètes (numérotées b, c et d) sont alors mises en évidence. Puis un suivi systématique de l'étoile par le télescope Trappist et le télescope spatial Spitzer permet ensuite d'en révéler quatre autres (e, f, g et h) en 2016. De la périodicité des transits et de l'intensité des baisses de luminosité de l'étoile, ils ont pu alors déduire que ces sept planètes sont toutes de tailles comparables à celle de la Terre (à 15 % près), et tournent très près de leur étoile. Les six planètes les plus proches en font ainsi le tour en respectivement 1,5 jour, 2,4 jours, 4, 6, 9 et 12 jours. Quant à la septième, sa période n'a pas pu encore être déterminée.

À la recherche de l’eau

À quoi ressemblent ces mondes ? Et sont-ils éventuellement propices à héberger la vie ? S’il est impossible aujourd’hui de répondre avec certitude à ces questions – aucune de ces planètes n’ayant pu être photographiée –, les astronomes disposent toutefois de suffisamment d’informations pour commencer à en dresser un premier portrait. Tout d’abord, en raison de leur taille, les sept planètes ont toutes les chances d’être rocheuses comme la Terre. Il ne s’agit donc pas de ces géantes gazeuses où toute forme de vie semble impossible.

Ensuite, étant donné la distance des planètes à leur étoile et la luminosité émise par l’astre, les astronomes ont pu estimer l’énergie que reçoivent celles-ci. Conclusion : « Trois d’entre elles (e, f et g) sont situées dans la zone dite «habitable » de leur étoile, cette région où il ne fait ni trop froid ni trop chaud pour permettre à l’eau, si elle est présente à leur surface, de rester sous forme liquide », précise Franck Selsis, un des auteurs de la découverte au Laboratoire d’astrophysique de Bordeaux2. Un élément indispensable pour permettre à la vie telle que nous la connaissons de se développer.

Sur ce diagramme figurent les tailles relatives des orbites des sept planètes gravitant autour de Trappist-1. La région grisée représente l’extension de la zone habitable, occupée par des planètes susceptibles d’être tout ou partie recouvertes d’eau liquide. L’orbite de la planète la plus extérieure, Trappist-1h, demeure à ce jour peu connue. Les pointillés matérialisent les autres limites possibles de la zone habitable, déduites d’hypothèses théoriques différentes.
Sur ce diagramme figurent les tailles relatives des orbites des sept planètes gravitant autour de Trappist-1. La région grisée représente l’extension de la zone habitable, occupée par des planètes susceptibles d’être tout ou partie recouvertes d’eau liquide. L’orbite de la planète la plus extérieure, Trappist-1h, demeure à ce jour peu connue. Les pointillés matérialisent les autres limites possibles de la zone habitable, déduites d’hypothèses théoriques différentes.

Les scientifiques ont d’ailleurs de bonnes raisons d’espérer que l’eau est bien présente à la surface de ces planètes. C’est la configuration particulière des planètes entre elles qui leur fait dire ça. Leurs orbites sont en effet en résonance les unes avec les autres : lorsque la planète g, par exemple, accomplit une orbite autour de Trappist-1, les planètes plus proches de l’étoile en accomplissent 6 (pour la planète b), 5 (c), 3 (d) et 2 (e). « Or, ces résonances seraient le résultat d’une migration collective des planètes vers l’étoile peu de temps après leur formation, explique Franck Selsis. Celles-ci seraient donc nées plus loin qu’elles ne le sont actuellement. Et à plus grande distance de l’étoile, l’eau, plus abondante, aurait pu ainsi entrer en proportion importante dans leur composition. »

Autre indice de la présence possible d’eau : la masse des planètes, estimée là encore grâce à la configuration atypique des sept objets. Parce que ces derniers sont à la fois très proches les uns des autres et en résonance, leurs interactions gravitationnelles font que les transits ne se succèdent pas de façon parfaitement périodique mais se produisent avec des avances ou des retards, parfois de plus d’une heure. C’est ce phénomène qui a permis d’évaluer la masse des planètes et donc, connaissant par ailleurs leur taille, leur densité. Résultat : les données actuelles semblent indiquer que les planètes de Trappist-1 sont peu denses, et donc riches en eau. « Mais ces mesures ne sont pas encore assez précises, d’autres observations seront nécessaires pour pouvoir arriver à une conclusion définitive », note Franck Selsis.
 

Jusqu’à trois planètes ont été « vues » passant simultanément devant le disque de l’étoile Trappist-1.
Jusqu’à trois planètes ont été « vues » passant simultanément devant le disque de l’étoile Trappist-1.

Des planètes aux situations extrêmes

En attendant, les astronomes explorent tous les scénarios climatiques possibles pour le cortège de planètes, en fonction de la quantité d’eau présente à leur surface ainsi que de la taille et de la composition de leur atmosphère. À cela, les scientifiques doivent ajouter un autre élément clé : étant donné la proximité des planètes avec leur étoile, les effets de marée gravitationnelle de l’étoile ont très probablement « bloqué » ces planètes, dont la rotation est désormais égale à la révolution autour de Trappist-1. Du coup, celles-ci présentent perpétuellement la même face à leur étoile. Du côté tourné vers l’étoile, il fait jour en permanence et du côté opposé, il fait toujours nuit.

Le résultat de ces modèles donne des cas extrêmes, même pour les planètes évoluant dans la zone habitable de Trappist-1. On peut ainsi avoir des planètes totalement sèches comme Vénus. Mais dans de nombreux cas, dès qu’il y a une atmosphère, l’eau se retrouve fréquemment à l’état liquide en surface. Certains de ces mondes virtuels semblent exotiques, avec un hémisphère diurne totalement aride et un hémisphère nocturne couvert d’une banquise et d’une mer. Parfois même, un océan recouvre toute la planète, avec une banquise partielle ou sans la moindre présence de glace.

Les sept planètes du système Trappist-1, ordonnées selon leur distance croissante à l’étoile hôte. Les surfaces planétaires imaginées par l’artiste témoignent de leur potentialité à abriter l’eau sous ses formes solide, liquide et gazeuse.
Les sept planètes du système Trappist-1, ordonnées selon leur distance croissante à l’étoile hôte. Les surfaces planétaires imaginées par l’artiste témoignent de leur potentialité à abriter l’eau sous ses formes solide, liquide et gazeuse.

Quant aux planètes qui ne se trouvent pas dans la zone habitable, il est possible néanmoins qu’elles contiennent de l’eau elles aussi. Les deux planètes les plus proches (b et c), par exemple, reçoivent pourtant de leur étoile respectivement quatre et deux fois plus d’énergie que la Terre n’en reçoit du Soleil. Côté jour, ce doit être la fournaise. Côté nuit, le froid sidéral. Mais au terminateurFermerLigne de démarcation entre les parties éclairées et les parties obscures d'une planète, ces régions se trouvant au crépuscule et à l’aube éternels de ces planètes, les températures pourraient être suffisamment clémentes pour que de l’eau s’y trouve à l’état liquide.

Bien qu'aucun de ces scénarios ne puisse aujourd’hui être privilégié, ils constituent des prédictions qui pourront être confrontées aux observations futures. Certes, aucune de ces planètes ne pourra être photographiée directement au télescope avant longtemps, car elles sont trop proches de leur étoile. En revanche, les astronomes pourront bientôt, grâce notamment au télescope spatial de la Nasa James Webb, qui doit être lancé en 2018, détecter, s’ils en sont pourvus, les atmosphères de ces astres, vérifier s'ils contiennent de l’eau et déterminer leur température. Et ainsi trancher sur leur habitabilité.

Voyage de la Terre à TRAPPIST-1

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Description: 
Un voyage animé de la Terre vers le système TRAPPIST-1 en passant par la Lune. Dans cette animation, les étoiles occupent leurs positions réelles, et la constellation du Verseau, dans laquelle se trouve le système, semble changer au fil de notre progression. La naine ultrafroide TRAPPIST-1 est si peu lumineuse qu’elle demeure invisible jusqu’à ce que nous nous en rapprochions et que les sept planètes qui gravitent autour d’elle soient également visibles.
Année de production: 
2017
Durée: 
0:44
Réalisateur: 
ESO/L. Calçada/spaceengine.org
Producteur: 
ESO

Avec la planète située autour de Proxima, découverte en août 2016, les planètes de Trappist-1 constituent aujourd’hui les seules exoplanètes rocheuses dont on va pouvoir caractériser les atmosphères. Et par là même les cibles les plus prometteuses dans la recherche de vie ailleurs dans l’Univers. « L’étude des naines ultrafroides présente un double intérêt, lance Franck Selsis. D’abord il est plus facile de voir une planète passer devant une toute petite étoile que devant un énorme soleil. Ensuite ce flux lumineux plus faible émis par l’étoile permet d’analyser plus facilement la lumière qui traverse l’atmosphère de ces planètes et donc d’en déduire la composition. » Quand on sait que 15 % des étoiles proches du Soleil sont des étoiles naines ultrafroides, on peut s’attendre à bien d’autres découvertes encore dans le futur. Avec peut-être parmi elles des jumelles de la Terre.
 

Trappist1_Periscope

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Description: 
Année de production: 
2017
Durée: 
Réalisateur: 
Producteur: 
CNRS
Intervenants: 
Emeline Bolmont (CEA) et Martin Turbet (LMD), co-auteurs de l'article paru dans Nature
 

 

Notes
  • 1. «Seven temperate terrestrial planets around the nearby ultracool dwarf star TRAPPIST-1», M. Gillon et al., Nature, 23 février 2017.
  • 2. Unité CNRS/Université de Bordeaux.
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Auteur

Julien Bourdet

Julien Bourdet, né en 1980, est journaliste scientifique indépendant. Il a notamment travaillé pour Le Figaro et pour le magazine d’astronomie Ciel et Espace. Il collabore également régulièrement avec le magazine La Recherche.

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